Le 22 février 1956, Marilyn Monroe pose pour le très célèbre photographe anglais Cecil Beaton (LE photographe de la famille royale d’Angleterre).
Je ne connais pas les circonstances qui ont fait que ces deux personnalités se rencontrèrent en ce jour. Nul doute que la collaboration récemment révélée entre Marilyn et Sir Laurence Olivier a dû ouvrir des portes. De plus les influences et pertinences de l’image qu’avait Milton Greene ont dû peser lourd dans la balance de cette commande.
D’ailleurs dans quel but eut lieu ce shooting ?
Si nous regardons la diffusion des images en 1956, fort est de constater que seul l’Italie, le Danemark, le Japon et d’autres pays européens ont acheté quelques clichés pour les mettre en couverture.
La rumeur veut que cette rencontre eut lieu dans le cadre du magazine « Harper’s Bazaar ». Beaton travaillait pour eux mais le magazine, à ma connaissance, n’utilisa pas ces photos pour un article. Donc pour moi, mystère.
Alors cette séance a pour but de promouvoir la « nouvelle Marilyn », celle que les studios, qu’Hollywood va devoir prendre au sérieux. Et quoi de mieux que Cecil Beaton pour donner une aura de respectabilité, de sérieux à Marilyn Monroe ?
Le lieu de cette rencontre magique est l’hôtel Ambassador. Construit en 1921, il fut démoli en 1966 pour laisser place à d’autres buildings.
Marilyn est déjà venue dans cet hotel. Elle y a séjourné une semaine en mars 1955. Un photographe l’immortalisa alors dans les différents espaces de la suite qu’elle occupait, il s’appelait Ed Feingersh et c’était pour le magazine Redbook. (Retrouvez cette collaboration dans le post « Marilyn par Feingersh »)
Il est très amusant de constater que pour cette séance du 22 février 1956, Cecil Beaton et Marilyn se sont retrouvés dans la même suite qu’elle occupait lors de cette semaine de mars 1955 ! Incroyable, non ? La preuve en images.
En haut une photo de la suite après réaménagement par Beaton en 1956. Elle était devenue la sienne et selon ses termes il l’avait redécoré dans une sorte d’Art Nouveau Japonais. En bas, une photo prise par Ed Feingersh en mars 1955.
Beaton avait gardé différent élément : Le paravent, la lampe rappelant le papier peint, ainsi que la lampe Tiffany et le sofa en rotin blanc. Exit les canapés et fauteuils.
L’évidence du même endroit vient de la fenêtre avec ses rideaux et sa balustrade… aucun doute possible.
Beaton fera d’autres photos dans cette suite notamment ce portrait d’Anne McDonnel (femme d’Heny Ford II) en janvier 1957. J’ai aussi retrouvé une photo que je pense de 1956 par Beaton de Joan Crawford sur un sofa qui rappelle celui sur lequel Marilyn posa. Seulement j’y mets un « mais » parce que si le coussin à motifs est bien présent, la tapisserie n’est pas là… alors est-ce bien le même canapé et sommes-nous au même endroit ?
Revenons au déroulement de cette séance.
Je ne sais combien de temps elle dura mais elle fut certainement longue au vu du nombre de changements de lieux ainsi que de styles. Beaton utilisera majoritairement des pellicules en noir et blanc. Cependant à plusieurs reprises il utilisa aussi des pellicules couleurs mais celles-ci sont peu nombreuses.
Marilyn commence à poser avec sa tenue d’arrivée : la petite robe noire de John Moore portée plusieurs fois (« Monroe et Olivier, une collaboration inattendue ») en cette année 1956.
Les premières sont celles près de la fenêtre avec son manteau. Ensuite le manteau disparaît pour laisser place à ses belles épaules nues. Après quel ordre donner ? Mystère, nous pouvons simplement supposé grâce à sa coiffure qui se modifie légèrement.
Dans cette tenue, elle pose de façon aguicheuse et rigolote sur le sofa. Elle est plus sérieuse sur le fauteuil en osier et presqu’enfantine assise par terre devant le paravent noir à motifs.
Un élément nouveau apparaît avec la robe noire : son manteau de fourrure blanche. A nouveau sur le fauteuil en osier, sa place à changer. Nous sommes désormais devant une des fenêtres. Marilyn apparaît très sérieuse même sombre sur certaines photos.
Marilyn se change et arbore une robe qui rappelle celle portée lors de la séance avec Phillippe Halsman qui apparue en couverture du numéro d’avril 1952 de Life. Le créateur de cette dernière est Ceil Chapman. Marilyn portera de très nombreuses années ses créations. Alors pourquoi pas ? A ma connaissance, Marilyn ne reporta jamais cette robe claire apparue durant cette séance avec Beaton.
C’est avec cette robe que Marilyn et Beaton gravèrent cette séance.
Le photographe va s’amuser avec la star. Il va la faire jouer avec une marguerite, un oeillet, et même un faux oiseau ! Les lieux vont être divers : le fauteuil en osier, un paravent sombre (le dos de celui à motifs ?) et même sur le lit au motif japonisant. Il lui fera porter une étole et chose unique dans la carrière de Marilyn, un bandeau de soie noué dans ses cheveux.
De cette orgie de clichés sortira la photo favorite de Marilyn. Joshua Logan et sa femme lui offriront une impression de celle-ci accompagnée d’une magnifique lettre manuscrite de Cecil Beaton datée de juin 1956 dans un triptyque en argent que Marilyn gardera toute sa vie. Une photo nous le montre dans l’appartement de Marilyn et Arthur à New York au mois de mai 1958.
Il fut vendu en octobre 1999 lors de la célèbre vente chez Christie’s. Estimé entre 15 000 et 20 000 dollars, il partit pour 145 500 dollars !
Beaton n’était pas seul avec Marilyn. Assise sur le sofa, nous distinguons la présence d’une femme. Qui est-elle ? Sur une autre photo, nous voyons un homme avec des lunettes, qui est-il ? L’assistant de Beaton ? Si oui, qui a bien pu prendre la photo ?
A chaque fois qu’il venait à New York, c’était le même et unique assistant que Beaton demandait : Ed Pfizenmaier, qui était aussi l’assistant régulier d’un autre grand nom de la photographie, Horst P. Horst (rien que ça !). Pour ceux que cela intéresse, retrouvez une interview de ce photographe : ICI.
Un autre photographe était aussi sur place : Hans Knopf. Que faisait-il là ? Et bien c’était un ami de Beaton.
Beaton avait pour habitude de fréquenter le laboratoire de l’agence PIX Publishing dont Knopf faisait parti. Pour la petite histoire, PIX Publishing fut créée par Alfred Eisenstaedt qui photographia Marilyn en 1953. Cette agence était composée principalement de photographes qui avaient fui l’Europe en guerre. C’était un îlot du vieux continent en plein coeur de Manhattan. Dans ses rangs vous retrouverez Ed Feingersh (tiens donc) et Georges Zimbel qui photographia Marilyn sur Lexington Avenue un certain soir de septembre 1954 lorsqu’un souffle d’air chaud lui fit relever sa robe….
Si vous voulez connaître un petit bout de l’historie de cette agence photo qui travailla essentiellement avec Life magazine, direction wikipédia.
Concernant les clichés pris par Knopf, notez qu’ils représentent que le début de la séance. Marilyn apparaît avec sa robe noire. Il a dû partir par la suite. La raison ? Mystère.
Par contre il est le lien entre l’interview donné à Elsa Maxwell au Waldorf juste avant la séance à l’Ambassador avec Beaton. Mais ceci est une autre histoire que je vous raconterai dans un autre article très prochainement.
NB : je ne parle pas du parcours du grand photographe qu’est Cecil Beaton. Je ne connais pas assez son oeuvre pour me permettre de vous en raconter ne serait-ce qu’un bout. Il faut simplement savoir qu’au delà d’être le photographe de la famille royale d’Angleterre et un grand nom de la photographie de mode, il fut aussi décorateur et costumier pour le Cinéma. Si vous avez vu « My fair Lady » vous connaissez Cecil Beaton !
[…] est Hans Knopf. Rappelez-vous, je vous en ai parlé dans l’article concernant la séance avec Cecil Beaton. Ce photo reporter travaille pour l’agence PIX Publishing, c’est un ami de Beaton. Ne […]
Formidable enquête ! Bravo.